Las d'être témoin des pâmoisons des uns devant les "canalisations" des autres, je vous livre ici quelques réflexions à propos de cette tendance à suivre, en France, les modes américaines.
Les prophètes dans les traditions - bibliques, grecques, ou autres - étaient des intermédiaires entre le divin et l’humanité, recevant des messages ou des visions qu’ils transmettaient ensuite à leur communauté. Leur rôle était souvent encadré par une autorité religieuse ou une structure hiérarchique bien définie.
La distinction entre ceux qui prétendent canaliser des informations depuis la “source” aujourd’hui et les anciens prophètes réside principalement dans les contextes culturels et esthétiques, mais il y a des similitudes profondes dans la fonction.
Dans le courant New Age, les individus qui prétendent canaliser des informations depuis une “source” (qu’elle s'appelle divine, cosmique, ou autre) se situent dans un contexte beaucoup plus informel et individualisé. La “source” est souvent perçue comme une entité spirituelle ou énergétique, et il n’y a pas forcément de cadre religieux traditionnel. Le vocabulaire a changé, mais l’idée de recevoir des messages d’une dimension supérieure reste proche.
Le cadre esthétique et les valeurs sous-jacentes diffèrent également. Là où les anciens pouvaient annoncer des révélations souvent teintées d’instructions morales ou sociales, les modernes tendent à aborder des sujets d’élévation personnelle, de guérison spirituelle, ou d’éveil collectif, avec un ton plus individualiste.
A part cette différence de cadre culturel, on pourrait dire qu’il y a une continuité dans le rôle d’intermédiaire entre une source transcendante et l’humanité. Les « prophètes » et les « canaliseurs » partagent une fonction similaire dans l’acte de transmettre un message perçu comme supérieur.
La marchandisation de la spiritualité
Le mouvement New Age et la tendance des gens à prétendre “canaliser” des informations depuis des sources mystérieuses apparaissent une véritable déviation spirituelle qui frôle souvent l’escroquerie morale. Nous nous trouvons en face d’un phénomène de vaste marchandisation spirituelle, un véritable supermarché de l’ésotérisme où tout est mis en vente : de la “guérison énergétique” aux enseignements “galactiques” venant soi-disant d’entités supérieures.
Le phénomène de canalisation s’inscrit dans une culture de consommation spirituelle. Beaucoup de ces “enseignements” ou “révélations” sont associés à des pratiques commerciales, comme la vente de livres, de stages ou de consultations.
Ce modèle capitalise sur la quête spirituelle des individus, mais cela peut aussi diluer la profondeur du travail intérieur en le transformant en produit de consommation.
Dans certaines formes de canalisation, il y a une tendance à projeter la responsabilité de ses actions ou de son chemin de vie sur des entités extérieures (anges, maîtres ascensionnés, etc.). Cela peut créer une forme de dépendance psychologique, où les personnes recherchent constamment des validations ou des directives venant de l’extérieur, au lieu de cultiver leur propre autonomie et responsabilité spirituelle. Ce qui est particulièrement pernicieux et dangereux car cela déresponsabilise l’individu face à ses choix.
L'égo comme voile d'illusion d'autorité spirituelle
Beaucoup de ceux qui prétendent recevoir des messages depuis une “source” adoptent une posture d’autorité spirituelle subjective et auto-centrée. Contrairement aux traditions anciennes où les prophètes étaient souvent soumis à des rituels ou à des structures communautaires, ils agissent de manière autonome.
Cela peut entraîner une forme de dérive spirituelle, où les personnes qui les suivent abandonnent leur propre discernement, cherchant des réponses extérieures à des questions intérieures.
En s’adressant à des personnes en quête de sens, souvent dans des moments de crise ou de doute, ces figures peuvent se poser en « sauveurs » spirituels. Cela peut engendrer des relations de pouvoir asymétriques, où les adeptes deviennent émotionnellement et psychologiquement dépendants de ces guides.
J'observe chez ces individus "branchés" à leur source une sorte d’arrogance déguisée en humilité. Ils prétendent être en contact avec des forces ou des entités divines, angéliques, ou extraterrestres, tout en jouant les modestes porte-parole de la “vérité”. En réalité, ils se posent en nouveaux prêtres d’une religion sans dogme, où la soumission à leur “connaissance” est implicite.
Nous sommes loin des mystiques d’autrefois qui vivaient leur spiritualité en silence, dans l’intimité d’une relation sacrée avec le divin.
Aujourd’hui, la prophétie est un business lucratif, une machine à cash qui exploite le désarroi spirituel et le vide laissé par la disparition du sacré de l'espace public. Chaque “message” devient un produit : conférences payantes, consultations hors de prix, ateliers en ligne, sans parler des innombrables gadgets pseudo-spirituels. Ils ont transformé la quête intérieure en produit de consommation rapide, en bon gestionnaire de leur fast-food mental. C’est un écoulement massif de vide emballé dans des mots-valises très pratiques pour qui aime voyager léger.
Croire en tout c'est croire en rien
Le New Age promeut un relativisme spirituel destructeur. Dans cet océan d’informations contradictoires, tout se vaut. Ce relativisme étouffe la pensée critique, il noie les vraies questions spirituelles dans un bouillon d’incertitudes et de pseudo-sagesses creuses.
Cela génère une confusion généralisée où les gens finissent par se détourner de toute quête authentique, convaincus que tout est à prendre sans tri, et que la profondeur n’est qu’une question de ressenti personnel.
Les enseignements canalisés varient grandement et sont souvent contradictoires, car chaque "canaliseur" prétend accéder à sa source directement. Mais laquelle est-ce ?
Cela contribue à une fragmentation des perceptions spirituelles et peut semer de la confusion. La prolifération de ces messages peut aussi mener à un relativisme spirituel, où toute vérité est perçue comme valable, quelle que soit sa cohérence ou sa profondeur.
Cela affaiblit les fondations sur lesquelles une véritable quête spirituelle peut s’établir.
Déconnexion de la réalité matérielle
Certaines formes de canalisation encouragent une déconnexion du monde matériel, avec des discours centrés sur des dimensions supérieures ou des réalités parallèles. Cela peut conduire à une fuite des problèmes concrets de la vie quotidienne et les responsabilités personnelles dans le monde physique.
À long terme, cela affaiblit l’engagement dans les luttes réelles et urgentes du monde contemporain.
Pire encore, ce mouvement encourage un désengagement total de la responsabilité personnelle. Plutôt que de se confronter à leurs propres failles, les adeptes se réfugient dans l’idée qu’un “guide” ou une “entité” viendra leur dire quoi faire.
C’est une forme de paresse spirituelle institutionnalisée. Ces messages sont souvent simplistes, évitant toute confrontation avec les véritables enjeux du monde, préférant s’envoler dans des histoires de “nouvelles vibrations” et de “fréquences cosmiques”, qui évacuent toute réflexion critique sur la souffrance, l’injustice et la complexité de la condition humaine.
La promesse d’une guidance divine ou d’un contact avec des êtres supérieurs crée une dépendance émotionnelle forte, et des gens qui, au lieu de retrouver leur propre pouvoir intérieur, se soumettent à ces charlatans spirituels. C’est une forme moderne de manipulation émotionnelle et mentale, où l’on troque la liberté intérieure contre un confort illusoire, souvent très coûteux.
Le vide spirituel comme norme
Au final, ce mouvement contribue à un appauvrissement massif du paysage spirituel. Là où les traditions spirituelles authentiques prenaient le temps d’explorer en profondeur les questions de l’âme, du sens et de l’existence, le New Age remplace tout ça par des formules prêtes à consommer. On ne se transforme plus spirituellement, on consomme de la spiritualité. Cela crée un vide, où l’on répète des slogans vides de sens – “tout est amour”, “élevez vos vibrations” – sans jamais se confronter à la véritable transformation intérieure, qui nécessite rigueur, discipline et engagement.
En bref, le mouvement des canaliseurs et du New Age est un détournement, un divertissant fourre-tout spirituel qui mine l’authenticité des quêtes intérieures. Il dissémine de fausses promesses, manipule les esprits, et contribue à un glissement généralisé vers une culture de la superficialité. Les dégâts sont réels : confusion mentale, perte de repères, exploitation financière et émotionnelle.
C'est la dégradation de la quête spirituelle en une affaire commerciale, enrobée dans des discours séduisants mais vides de sens profond. Le génie américain.
La Révélation d’Arès
“La Révélation d’Arès” est un ouvrage prophétique écrit par Michel Potay, qui prétend avoir reçu des révélations divines dans les années 1970. Ce texte se présente comme une communication directe avec Dieu et le Christ, et se distingue du mouvement New Age en plusieurs points.
Origine religieuse distincte
Contrairement au New Age, qui se nourrit d’un mélange d’ésotérisme occidental, de mysticismes orientaux, et de psychologie moderne, “La Révélation d’Arès” s’ancre dans une tradition monothéiste. Michel Potay, ancien prêtre orthodoxe, se positionne dans une lignée prophétique héritée du christianisme et non dans une spiritualité éclectique ou alternative.
Une portée sociale et politique
L’un des aspects clés de “La Révélation d’Arès” est son appel à une transformation morale et spirituelle de l’humanité, mais avec une dimension clairement politique et sociale. Le texte encourage les lecteurs à réformer leur vie, à se libérer des structures oppressives, et à retrouver une forme de pureté spirituelle.
Contrairement aux messages New Age souvent individualistes et centrés sur le bien-être personnel ou la guérison énergétique, “La Révélation d’Arès” appelle à un engagement collectif vers la paix, l’amour et la justice.
“La Révélation d’Arès” se positionne contre la marchandisation de la spiritualité, un élément central du New Age. Michel Potay a refusé d’exploiter commercialement son mouvement, en interdisant la vente du livre ou la création d’une organisation hiérarchique lucrative. Cela marque une grande différence avec les figures du New Age, dont les pratiques sont souvent accompagnées de modèles économiques basés sur des consultations, des stages et des produits dérivés. Génie français.
Il a fondé une communauté et se définit lui-même comme un pélerin.
L’œuvre insiste sur la réforme de soi et sur l’action collective, appelant à un renouveau moral et éthique, en opposition au relativisme du New Age. Là où le New Age encourage souvent une diversité de croyances et de pratiques, “La Révélation d’Arès” prône une vision claire de la relation entre l’homme et Dieu, tout en rejetant les dogmes religieux institutionnalisés.
Ainsi, “La Révélation d’Arès” partage avec d’autres courants prophétiques le fait de revendiquer une transmission divine, elle se distingue par sa profondeur théologique, sa dimension sociopolitique, et son rejet de la marchandisation spirituelle, la plaçant loin des dérives du New Age.
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